Lorsque je reçois des couples pour la première fois, je leur demande ce qu’ils attendent de notre entretien de conseil conjugal. Il n’est pas rare que j’entende « je vous amène ma femme parce qu’elle n’arrête pas de me critiquer… » ou « mon mari passe plus de temps avec son ordinateur qu’avec moi, j’aimerais que vous lui expliquiez que ce n’est pas ça un couple… ! ». En définitive, ils me demandent de dire à leur conjoint de changer. Impossible !
Tous les couples, même ceux qui durent et qui vont apparemment bien traversent des moments difficiles. D’ailleurs la relation de couple n’est pas un état mais un processus de développement continu qui évolue par crises régulières. Lors de ces crises, chacun pense que c’est la faute de l’autre et que l’autre a changé. Mais est-ce vraiment l’autre qui a changé ? Ou est-ce moi qui ai changé ? Ou encore n’est-ce pas mon regard sur l’autre qui a changé ?
Quand un couple fait la démarche d’aller voir une conseillère conjugale et familiale, c’est déjà un grand pas vers un changement. Mais au lieu de se dire « si je me bats pour mon couple, est-ce que ça va marcher ? », le couple devrait plutôt se poser la question « qu’est-ce que je veux ? me battre pour mon couple et essayer de changer ou attendre que l’autre change ? ».
C’est évidemment plus facile de désigner son conjoint comme responsable de ses problèmes plutôt que de s’interroger sur ses propres responsabilités. On exige souvent plus de l’autre que ce qu’on se demande à soi-même. De même qu’on voudrait parfois que son conjoint comprenne ce qui nous agite alors que nous n’y arrivons pas nous-même. Aussi beaucoup de personnes projettent-elles leurs propres failles et erreurs sur leur conjoint pour s’en débarrasser ! Or ce n’est pas le conjoint qui est responsable de la souffrance qu’une personne éprouve mais la relation de couple qu’ils ont construite ensemble. Certaines personnes semblent persuadées que leur conjoint était mieux avant et par conséquent elles restent fixées à l’image idéalisée de l’autre ; alors qu’en fait c’est leur regard qui a changé. Les crises sont des moments de réorganisation. Ces crises sont donc de bonnes opportunités de redéfinir les rôles de chacun et non de chercher systématiquement à changer l’autre. Vouloir changer son conjoint peut être une manière de le culpabiliser en lui faisant « porter le chapeau » ; ainsi le conjoint risque de se retrouver tout seul à porter la responsabilité de réparer leur couple. C’est très lourd, trop lourd. Quand un couple est en crise, chacun reproche inconsciemment (ou non) à son conjoint de ne pas combler son manque ; du coup ça fige la situation car les conjoints ne cherchent pas à changer puisqu’ils laissent à l’autre toute la responsabilité. Accuser son conjoint nous dédouane. Donc, quand un couple va mal, au lieu de vouloir changer son conjoint, chacun doit se demander en quoi il a contribué à la relation conflictuelle et quelle est sa part de responsabilité. Le couple doit travailler à trouver des ajustements et des concessions ou compromis tout en respectant les positions de chacun. Ce travail que j’appelle un travail d’amour est exigeant mais indispensable. Il demande à chacun des conjoints des efforts et surtout de la volonté. Rester avec son conjoint et sauver son couple est une décision avant tout.
Au lieu de vouloir changer son conjoint, chacun doit vouloir et essayer de se changer lui-même. Car en se changeant soi-même, on provoquera sûrement un changement chez son conjoint.
J’aimerais conclure en citant le Pape François dans son dernier livre « la joie de l’’amour » : « Il a beau sembler évident que toute la faute est de l’autre, il n’est jamais possible de surmonter une crise en espérant qu’uniquement l’autre change ».