A une réunion de parents d’élèves de 6èmes à laquelle je présentais le programme que nous allions faire avec leurs enfants, une maman m’a apostrophée, l’air indigné : « Mais, madame, vous n’allez quand même pas parler de pornographie en 6ème à des petits de 11 ans ! Le mien n’en n’a jamais entendu parler et ne connait sans doute même pas ce mot ! ». Ça reste à voir, hélas ! Je comprends l’interrogation de cette maman car à notre époque, quand nous étions à l’école, nous n’avions pas Internet, tous ces nouveaux multi-médias. Donc nous n’étions pas ou peu touchés par la pornographie. Mais les temps ont changé et sachez, chers parents, que vous le vouliez ou non, et quelle que soit la bonne éducation que vous donnez à vos enfants, les enfants d’aujourd’hui entendent parler de la pornographie très tôt et malheureusement en regardent aussi parfois très tôt.
Je pense à cette femme que j’ai reçue la semaine dernière suite à un RV pris en urgence car elle venait de découvrir que son enfant de 12 ans « gentil et naïf selon elle » regardait des films porno sur U Porn depuis 1 mois. Qu’est-ce qui l’avait alerté ? Son fils devenait agressif avec son petit frère et ses parents, il mentait et surtout commençait l’année de 5ème avec de très mauvaises notes alors qu’il était excellent élève l’année précédente. Elle se rendait compte que son fils avait un problème. Elle et son mari ont d’abord cru qu’il subissait un racket ou un harcèlement à l’école. Ils ont fouillé dans l’historique de son téléphone portable et ont découvert avec horreur (mot utilisé par la mère) que leur petit garçon avait vu près d’une centaine de clips ou films porno. Cette pauvre maman m’a dit qu’elle et son mari « étaient tombés de très haut ». « Pourtant, m’a-t-elle dit, on avait mis un contrôle parental mais notre fils a craqué les mots de passe, je n’en reviens pas… ». Elle se désolait que « ça leur arrive à eux alors qu’ils donnent une éducation catho à leurs enfants, que leur fils est scout… ». Quand les parents ont dit à leur fils ce qu’ils avaient découvert, l’enfant a eu l’air soulagé comme si ses parents lui enlevaient un poids. Il s’est effondré dans leur bras en disant que ces films c’était l’enfer. Il leur a expliqué qu’il avait commencé à en voir chez un copain « pour rigoler » et qu’ensuite, poussé par la curiosité et une excitation grandissante, il avait continué chez lui. Mais qu’il n’arrivait pas à arrêter. Les parents ont eu le bon réflexe de prendre un RV en urgence avec un pédo-psychiatre et de prendre RV avec la responsable de niveau du collège. Ensuite la mère m’a contacté car elle avait besoin de déposer sa souffrance et un fardeau de culpabilité. Et elle m’a demandé de faire une séance (plusieurs si nécessaire) d’EARS (éducation affective, relationnelle et sexuelle) à son fils, comme nous avons l’habitude de le faire dans les écoles.
Si vous découvrez que votre enfant a vu ou regarde des films porno, pensez tout d’abord que votre enfant est une victime, et non un mauvais garçon (ou une mauvaise fille). La plupart du temps, les enfants tombent par hasard sur un clip porno en naviguant sur Internet, pour une recherche scolaire ou pour des jeux. La curiosité est humaine et ces enfants cliquent sur la fenêtre du site porno sans se douter de ce qui va suivre. Pour avoir entendu beaucoup de témoignages d’enfants, je sais que ces enfants (surtout en-dessous de 15 ans) sont choqués, sidérés. Et ils n’osent pas en parler à leurs parents car ils ont peur d’être punis.
Certains en font des cauchemars pendant des mois et ont une vision très négative de la sexualité. Aussi la prévention est-elle très importante. Les prévenir que ça existe ne veut pas dire les inciter à aller voir mais plutôt les mettre en garde pour les protéger. Si les parents ne le font pas, certains camarades de classe s’en chargeront … pas forcément de manière délicate et juste.
L’addiction à la pornographie des jeunes devient un fléau national. Pour la contrer, notre travail de CCF et votre rôle de parent est d’expliquer aux enfants que les relations homme-femme et la sexualité sont magnifiques et sources de grand bonheur. Les enfants attendent ce message.